Monsieur le Président,
Les années passent, prétextes à des bilans. Le mien, au terme de plusieurs décennies d’enseignement et de recherche universitaire, au Maroc et à l’étranger, reste entaché par un “mic-mac” tricoté au sein de l’Université Chouaib Doukkali.
De quoi s’agit-il ? C’est très simple. Suite à ma demande d’inscription en tant qu’architecte, professeur assistant à l’Ecole Nationale d’Architecture (1), à une habilitation à diriger les recherches, présentée à cette Université, vous m’aviez répondu, avec délicatesse et une grande amabilité : “(…) Je serai heureux de vous recevoir à El Jadida quand vous le souhaitez. Nous discuterons des possibilités qui vous permettront de soutenir une habilitation à diriger les recherches à El Jadida ou dans une autre université marocaine qui dispose d’une formation doctorale en architecture” (2).
Il s’est avéré que ma demande était recevable à la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de cette Université et que la coordination de cette candidature serait confiée au Doyen de cette Faculté. Au terme de l’entretien que j’ai eu avec ce dernier le 13 février 2013, la thématique retenue a été celle de l’ “Urbanité”. J’ai par la suite porté à la Faculté les pièces constitutives du dossier de candidature, telles que stipulées par le règlement en vigueur à l’Université Chouaib Doukkali.
Vous pouvez aisément comprendre, Monsieur le Président, ma surprise à la lecture du jugement du Jury : “Le dossier du candidat se compose de travaux spécialisés dans les domaines de l’aménagement urbain et l’architecture. L’attestation du doctorat du candidat relève d’une spécialisation de Linguistique générale. Etant donné que le diplôme obtenu n’est pas conforme au contenu du dossier scientifique, il s’ensuit que les conditions thématiques et scientifiques ne permettent pas de donner suite à votre candidature” (3). Ma surprise porte non pas sur le rejet de ma candidature, mais sur la manière dont on est passé d’une formation doctorale en architecture à une spécialisation de Linguistique Générale ? C’est là justement que se niche le “mic-mac”.
Il se trouve, Monsieur le Président, que tout en poursuivant mes études d’architecture et l’obtention du diplôme d’architecte d.p.l.g. qui est la première attestation inscrite sur mon CV, j’ai parallèlement suivi des études dans d’autres disciplines. C’est ainsi que j’ai obtenu un Diplôme d’Etudes Approfondies en Sociologie urbaine et un Doctorat de Linguistique Générale (option épistémologie). Ceci figure dans mon Curriculum Vitae et j’ai, comme cela m’a été demandé par le Coordinateur de l’examen de ma candidature, remis copie de mon diplôme d’architecte d.p.l.g. et copie de ma thèse de Linguistique Générale.
. Une lecture attentive de mon CV (4), résumé en deux pages, montre clairement que le terme “linguistique” y figure une seule fois. Il n’apparaît ni dans ce qui a trait à l’expérience professionnelle ou aux publications, ni à la participation à des manifestations internationales ou aux activités associatives, etc. Il n’apparaît qu’une seule fois, là où justement il ne pouvait pas ne pas apparaître, c’est-à-dire parmi les diplômes obtenus.
. Par ailleurs, Monsieur le Coordinateur de l’examen de ma candidature avait vivement insisté sur une synthèse que devait présenter tout candidat et qui allait constituer le document à partir duquel et autour duquel toutes les pièces du dossier s’articulent et trouvent leur cohérence. Dans le document que j’ai donné dans cette perspective, document de sept pages, le terme de “Linguistique” n’apparaît qu’une seule fois sur 3.528 mots et uniquement pour la même raison que celle citée dans le dans le paragraphe précédent ci-dessus.
. L’entretien du 13 février 2013 au terme duquel il fut convenu que le thème de l’habilitation serait l’urbanité, s’est déroulé devant témoin, mais comme tout ce qui est oral peut être récusé ou faire l’objet d’amnésie sélective, laissons place à l’écrit qui ne peut être renié. Voilà ce qu’avait écrit le Coordinateur dans son courriel du 23 mars 2013 : “Pour ce qui est de ta question, j’estime qu’il serait plus pertinent de se limiter aux volets “archéologie” et “urbanité”. La présence d’un architecte (comme expert) serait la bienvenue” (5).
Ainsi le coordinateur confirme, par écrit, que la thématique convenue dès le début était bien l’ “Urbanité”. Il dévoile, ce faisant, le changement qu’il a de lui-même opéré par la suite de mettre “Linguistique Générale” à la place de “Urbanité”. C’est sur ce changement incompréhensible que reposent le “mic-mac” et par voie de conséquence le “jugement du jury”. Vous conviendrez, Monsieur le Président, que souhaiter “la présence d’un architecte (comme expert)” pour évaluer une candidature à l’habilitation à diriger les recherches en “Linguistique Générale” relève du burlesque. Il s’agit là d’une manipulation du jury, sans le moindre respect de l’éthique et de l’exigence de vérité attendues d’un universitaire, de surcroît Doyen d’une Faculté. Ainsi, un universitaire bafoue toutes les règles administratives et éthiques sous l’aile protectrice du Président de l’Université au nom duquel il signe par délégation.
Ce qui est ici, dans cet écrit atemporel, soumis à votre vigilance et à votre autorité est affaire de principe. Je souhaite, par cette démarche, vous alerter et demander de la part de la présidence un examen des faits relatés, sans complaisance ni privilège, dans un esprit qui fasse prévaloir les principes essentiels à l’exigence de vérité qui, seule, pourrait éviter que de tels débordements se reproduisent et pourrait contribuer à redonner une crédibilité au monde universitaire que vous incarnez.
Je vous prie d’accepter, Monsieur le Président, l’expression de ma haute considération.
Saïd Mouline
Rabat, le 21 mars 2016
Copie pour information aux institutions concernées
(1) Cf. Autorisation du Directeur du 27 mars 2013.
(2) Cf. Votre courriel du 11 janvier 2013.
(3) Cf. La lettre IF0730 en date du 13 décembre 2013.
(4) Cf. CV joint.
(5) Cf. Courriel joint du Coordinateur du 23 mars 2013.